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La grippe saisonnière, possible descendante directe de la grippe "espagnole"
La grippe saisonnière, possible descendante directe de la grippe "espagnole" / Photo: HO - CDC/AFP/Archives

La grippe saisonnière, possible descendante directe de la grippe "espagnole"

Conservés dans du formol, décryptés par la génétique, des tissus pulmonaires européens du début du XXe siècle apportent de nouvelles connaissances sur la grippe "espagnole", dont l'un des virus de grippe saisonnière pourrait être un descendant direct, selon une étude publiée mardi dans Nature.

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Pandémie respiratoire la plus dévastatrice du XXe siècle, la grippe de 1918-1919, dite "espagnole" - un terme trompeur car cette pandémie est loin de s'être concentrée sur l'Espagne -, a tué un total estimé de 50 à 100 millions de personnes.

Son origine virale n'a été confirmée que dans les années 1930. Par la suite, des recherches ont identifié le coupable: un virus de grippe A de sous-type H1N1.

Mais il reste encore des mystères sur la grippe espagnole. Des généticiens cherchent à les dissiper depuis une vingtaine d'années, mais leur tâche est limitée par le faible nombre de spécimens de victimes à analyser.

Après une quinzaine de démarches infructueuses, Sébastien Calvignac-Spencer, spécialiste d’évolution virale à l’institut Robert Koch (Allemagne), raconte que lui et ses collègues ont été "extrêmement chanceux". Ils ont eu accès à 13 échantillons de poumons gardés dans du formol dans des musées de Berlin et Vienne, datant de 1901 à 1931, dont six de 1918-1919.

Et ils ont décelé des fragments d'ARN du virus de la grippe espagnole dans trois échantillons de 1918.

Ces chercheurs ont réussi à séquencer de grandes parties du virus ayant infecté deux personnes, mais aussi un génome entier dans le troisième cas. Auparavant, "il y avait seulement des séquences de 18 spécimens dans le monde, deux génomes complets, aux États-Unis", et "aucune information génétique sur les premières phases de la pandémie", a souligné Sébastien Calvignac-Spencer lors d'un point presse.

La grippe espagnole a, en effet, connu trois grandes vagues. Les deuxième et troisième ont été particulièrement meurtrières, plus que la première s'étant développée lors du printemps 1918.

Leurs travaux ont notamment détecté des variations génomiques au fil de la pandémie et de son parcours à travers le monde via des allers-retours favorisés par les transferts de soldats à la fin de la Première guerre mondiale.

Dès les premiers temps de la grippe espagnole, un gène du virus semble avoir évolué pour contrer la réponse immunitaire humaine.

- Échantillon "très limité" -

Surtout, "ces nouvelles analyses sont compatibles avec le scénario d'une origine pandémique pure des virus grippaux saisonniers", une filiation directe, selon l'étude.

Cela bat en brèche d'autres hypothèses sur l'émergence de la grippe saisonnière, notamment l'idée - dite du "réassortiment" - que les virus actuels seraient constitués de plusieurs fragments issus d’ancêtres hétéroclites.

Difficile de décrire en revanche comment la pandémie grippale de 1918 s'est progressivement muée en virus saisonnier, "par manque de données" notamment sur les années 1920, a expliqué Thorsten Wolff, virologue à l'institut Robert Koch.

Ces recherches peuvent-elles donner quelques clefs sur l'évolution du Covid ?

Si l'on ne peut pas comparer ces deux pandémies, vu "des virus différents, des conditions de propagation très différentes, des humains organisés et connectés différemment", certaines similarités peuvent exister, selon Sébastien Calvignac-Spencer.

"Par exemple, la grippe de 1918 a connu plusieurs vagues comme le Covid, mais contrairement à la pandémie de Covid, où les vagues sont associées à de nouveaux variants, ce n'était probablement pas le cas pour la pandémie de 1918 selon notre étude", a-t-il noté.

L'étude dans Nature comporte cependant une limite, son "très petit échantillon de taille", reconnaissent ses auteurs, soulignant que leurs résultats restent "préliminaires".

"Des génomes supplémentaires d'échantillons entourant la période pandémique, ainsi qu'une caractérisation phénotypique de plusieurs virus 1918 in vitro et in vivo, permettront sans aucun doute une analyse plus robuste", estiment-ils.

Reste à trouver de nouveaux spécimens pathologiques préservés.

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