De TotalEnergies à Shell, des bénéfices en recul grignotés par la baisse des hydrocarbures
TotalEnergies a encore réalisé de solides bénéfices de 4,1 milliards de dollars au deuxième trimestre, bien qu'en nette baisse de 28% sur un an, conséquence du recul des prix du gaz et du pétrole qui a aussi fait perdre des milliards à Shell et à d'autres compagnies pétrolières.
L'année dernière avait été exceptionnelle pour les majors. TotalEnergies avait gagné un bénéfice net annuel de 20,5 milliards de dollars (19 milliards d'euros), son record absolu après ses 16 milliards de 2021.
Comme ses concurrentes occidentales, le géant français avait profité de la flambée des prix du gaz et du pétrole. Le marché était alors bouleversé par la reprise économique post-pandémie et plus encore par l'offensive russe en Ukraine et la décision de Moscou de couper les approvisionnements gaziers dans les pipelines vers l'Europe.
Depuis, les pays qui dépendaient des énergies fossiles de Moscou ont réorganisé leur stratégie d'approvisionnement, contribuant à un repli des prix des hydrocarbures.
Repsol, Shell, Equinor... toutes les compagnies pétro-gazières ont présenté des résultats semestriels rognés par la baisse des cours. Shell a malgré tout gagné 3 milliards de dollars.
Le baril de pétrole Brent de la mer du Nord s'est vendu en moyenne à 78,1 dollars au 2e trimestre, loin des presque 114 dollars de moyenne l'an dernier à la même époque. Côté gaz, TotalEnergies a vendu son GNL au prix moyen de 9,84 dollars/Mbtu (milliers d'unités thermiques britanniques, l'unité de référence), au 2e trimestre, contre 13,96 dollars au même trimestre 2022.
Une accalmie, donc, mais jusqu'à quand?
Il y a peu, le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, s'est montré prudent sur les approvisionnements en gaz cet hiver, indiquant que s’il faisait froid en Europe, les stockages ne suffiraient pas pour répondre à la demande, ce qui nécessiterait plus d'importations et à des prix élevés. "Les prix d'amis ne marchent pas dans un marché d'offre et de demande", a-t-il averti.
- "poule aux oeufs d'or" -
Malgré cette baisse, le groupe compte encore sur une très bonne année 2023, grâce notamment à une stratégie payante dans le gaz naturel liquéfié (GNL).
TotalEnergies est le 3e acteur mondial du GNL, et parie depuis plusieurs années sur le gaz, aux Etats-Unis, au Moyen-Orient et en Russie. Dans ce pays, il détient toujours 20% dans le champ gazier de Yamal LNG en Sibérie, au côté de la société privée russe Novatek (50,1%).
"L'entreprise continue d'acheter du gaz russe, envoyant de l'argent à la machine de guerre russe", a dénoncé jeudi Jonathan Noronha-Gant, de l'ONG Global Witness, renouvelant ses appels à l'UE pour qu'elle sanctionne le GNL russe au même titre que le pétrole.
TotalEnergies a toujours assumé ces approvisionnements russes, soutenant que l'Europe en a besoin, faute d'en avoir par les gazoducs. "Si nous décidions de ne pas prendre les volumes de gaz, nous serions quand même obligés de les payer", justifie la société.
Le groupe, qui veut porter la part du gaz à 50 % dans son éventail de ventes d'ici à 2030 (contre 30% pour les produits pétroliers), a encore renforcé ses investissements dans le GNL en annonçant le mois dernier s'associer à un nouveau projet du terminal texan Rio Grande, une usine de liquéfaction de gaz, qui lui permettra d'augmenter ses capacités d'exports de 15 millions de tonnes par an.
De quoi alimenter encore les critiques des associations environnementales qui lui reprochent ses investissements continus dans les énergies fossiles, gaziers et pétroliers, responsables du changement climatique.
"Ces bénéfices sont encore et toujours le fruit de la stratégie climaticide de la major française, notamment sa stratégie basée sur le GNL (...) nouvelle poule aux oeufs d’or de TotalEnergies", a commenté Greenpeace France, alors que par ailleurs, sa production de pétrole a encore augmenté ce trimestre, grâce à de nouveaux champs au Nigeria, au Brésil et à Oman.
Le groupe répond aux critiques, en multipliant, tous azimuts, les annonces d'investissements à coups de milliards dans l'électricité renouvelable: par exemple son intention de développer 3 GW de projets solaires en Espagne ou encore l'équivalent dans l'éolien en Allemagne. Mercredi, il a annoncé l'acquisition à 100% de Total Eren, producteur d'électricité d'origine renouvelable, pour 1,5 milliard d'euros.
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