COP29: le Bangladais Yunus déplore une bataille "humiliante" pour l'argent
La bataille des pays en développement pour obtenir de l'argent en faveur du climat est "humiliante", a déploré mercredi le dirigeant par intérim du Bangladesh à la COP29, marquée par ailleurs par un regain des tensions entre la France et le pays hôte, l'Azerbaïdjan.
"C'est très humiliant pour les nations de venir demander de l'argent pour réparer (...) le problème que d'autres ont causé pour elles", a déclaré à l'AFP Muhammad Yunus, lauréat du prix Nobel de la paix, à Bakou où se déroule la conférence annuelle sur le climat de l'ONU.
La recherche d'un nouvel objectif financier pour aider les pays en développement à développer les énergies renouvelables ou résister aux désastres naturels est l'enjeu central à Bakou.
Les Occidentaux apparaissent peu enclins à débourser davantage en période d'austérité, appelant à la mobilisation du secteur privé - un "voeu pieux" pour les ONG.
La plupart des pays en développement sont favorables à un engagement annuel des pays riches d'au moins 1.300 milliards de dollars (contre une centaine aujourd'hui), et réclament davantage de subventions plutôt que des prêts.
Les négociateurs ont rendu public un nouveau projet d'accord sur le financement, avec une série d'options mais laissant en suspens les points de friction. Un nouveau texte de travail pourrait être publié dès jeudi.
Ces pourparlers habituellement vifs mais diplomatiques ne sont pas à l'abri de tensions géopolitiques sans lien avec la lutte contre le réchauffement climatique.
La ministre française de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher a ainsi annoncé depuis Paris qu'elle ne se rendrait pas à la COP29 à Bakou après des attaques "inacceptables" du président azerbaïdjanais, Ilham Aliev.
Celui-ci avait un peu plus tôt dénoncé les "crimes" du "régime du président Macron" dans les territoires français d'outre-mer. Emmanuel Macron n'était pas venu au sommet du début de la COP29.
- "Réaliste" -
Sur le front du climat, le Brésil a présenté son nouveau plan climatique, l'un des pays à s'engager davantage dans une diplomatie climatique menacée de panne face au retour de Donald Trump et à l'austérité en Europe.
La ministre brésilienne de l'Environnement a déposé mercredi à Bakou auprès du chef de l'ONU Climat la nouvelle feuille de route de son pays à l'horizon 2035, document obligatoire dans le cadre de l'accord de Paris et qu'encore peu d'Etats ont formellement dévoilé.
Mais plusieurs dirigeants occidentaux traumatisés par l'inflation, les déficits publics et les mouvements sociaux des dernières années, ont de leur côté ouvertement déclaré vouloir appuyer sur le frein plutôt que sur l'accélérateur.
La cheffe du gouvernement italien, Giorgia Meloni, a assuré qu'il n'existait "aucune alternative unique" aux énergies fossiles, qu'il fallait avoir une vision "réaliste".
"On ne peut pas se précipiter dans les oubliettes industrielles au nom de la neutralité carbone", a déclaré le Premier ministre conservateur grec Kyriakos Mitsotakis.
- Que faisons-nous là? -
Ces débats se tiennent dans l'année qui sera vraisemblablement la plus chaude jamais mesurée, et battra encore un record d'émissions de CO2, générées par la combustion du charbon, du pétrole et du gaz, selon une nouvelle estimation des scientifiques du Global Carbon Project.
Cette étude ajoute que le monde doit viser zéro émission nette de CO2 d'ici à la fin des années 2030 pour espérer contenir le réchauffement mondial à 1,5°C, par rapport à la fin du XIXe siècle. Soit beaucoup plus tôt que 2050, l'horizon actuellement envisagé par une centaine de pays.
"C'est ce que la présidence promeut depuis le début de l'année: la fenêtre temporelle se rétrécit et nous devons agir de toute urgence", a réagi auprès de l'AFP Ialtchine Rafiev, le négociateur principal de l'Azerbaïdjan pour la COP29.
Pour lui, "il est encore possible de maintenir 1,5°C à portée de main" et un accord sur le financement climatique d'ici le 22 novembre "ouvrira sans aucun doute la voie".
L'ambiance générale de doutes a été bien résumée par le Premier ministre d'un petit pays habituellement discret dans cette enceinte, l'Albanie.
"La vie continue avec ses vieilles habitudes", a regretté Edi Rama. "Que diable faisons-nous dans cette assemblée, si encore et encore, il n'y a pas de volonté politique commune de s'unir et de passer des paroles aux actes ?"
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