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Au marathon de New York, Jasmine, coureuse aveugle, veut sentir "les vibrations"
Au marathon de New York, Jasmine, coureuse aveugle, veut sentir "les vibrations" / Photo: Thomas URBAIN - AFP

Au marathon de New York, Jasmine, coureuse aveugle, veut sentir "les vibrations"

Au départ du marathon de New York dimanche, Jasmine Murrell, aveugle, n'apercevra pas la ligne des gratte-ciels de Manhattan ou les rangées de spectateurs en liesse mais compte bien ressentir les "vibrations" de cette course hors normes.

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Le mari de Jasmine, Kevin Orcel, atteint d'un glaucome moins avancé que celui de son épouse, sera aussi au départ mais ne se fait pas beaucoup d'illusions.

"Après deux ou trois kilomètres, elle va décoller", plaisante le trentenaire, qui contrairement à sa compagne, va vivre son premier marathon, après 12 semi-marathons.

Venus du New Jersey, Jasmine et Kevin pourront compter chacun sur le soutien de deux guides de l'association Achilles International, le plus grand organisme mondial d'accompagnement des personnes en situation de handicap sur des courses d'endurance.

Un des deux guides de Jasmine s'entraîne avec elle depuis longtemps. "C'est important d'avoir cette connexion", dit-elle. "Il sait déjà ce qu'il faut annoncer et quelle est la meilleure façon de communiquer."

Jasmine, mère d'un jeune garçon nommé Elijah, peut voir des ombres et des formes de son oeil droit, mais rien côté gauche.

Kevin compte sur ses accompagnateurs pour lui dépeindre un peu de la folie ambiante. "Je leur dis: +Lisez-moi les pancartes+. Il y en a pas mal qui sont drôles et elles peuvent aussi vous motiver."

"Pour moi, ce sera les vibrations de la foule, les encouragements et tout ce bruit", explique Jasmine. "Je vais convertir ça en stimulation, donc je serai aussi capable d'avoir cette poussée d'adrénaline et d'excitation."

"Je demande toujours les préférences (des coureurs) avant", raconte Tianna Biscone, bénévole d'Achilles, car "pour certains, courir est difficile et ils préfèrent se concentrer là-dessus" et limiter les échanges avec leur guide.

Mais pour les concurrents qui sont prêts à discuter, dit-elle, "c'est vraiment sympa, surtout durant un marathon", de signaler "les panneaux amusants, les costumes, de les aider à vivre ça d'une autre manière".

- "Rien à penser" -

Participer à un événement de masse qui réunit plus de 50.000 personnes lorsqu'on a une vision limitée ou nulle est un défi.

"Quand j'ai fait mon premier jogging, j'avais 22 ans et je ne m'étais jamais déplacé sans ma canne", se souvient Francesco Magisano, aveugle et aujourd'hui directeur de l'antenne new-yorkaise d'Achilles.

"Courir vers l'inconnu a été l'une des choses les plus terrifiantes que j'aie jamais faites", dit celui qui a depuis fini un marathon en 3H30. "Il m'a fallu quelques mois d'entraînement pour être suffisamment à l'aise et me détendre."

Le dispositif classique comprend un guide relié par une cordelette à son coureur non-voyant ainsi qu'un second accompagnateur placé quelques mètres devant pour signaler d'éventuels obstacles et en écarter certains.

"L'an dernier, je n'ai pas réalisé que j'étais fatiguée avant le 40e kilomètre", sur 42, se remémore Sarah Luposello, également bénévole pour Achilles. "J'étais tellement concentrée sur le parcours, (...) le sol. Est-ce qu'il y a un trou? Une peau de banane qui traîne? Une station de ravitaillement?"

L'antenne d'Achilles à New York est de loin la plus importante de ce réseau mondial, avec environ 700 coureurs et 4.500 bénévoles.

"Je finis toujours par perdre ma voix après avoir guidé un marathon, parce qu'on parle tout le temps, à son athlète ou pour demander aux gens de s'écarter", décrit Tianna Biscone. "C'est pour ça que j'aime tant ça. C'est un défi vraiment unique que vous ne pouvez pas vivre en courant seul."

Si les premières sensations du coureur non-voyant sont souvent teintées de nervosité, une fois l'habitude prise et une relation nouée avec un guide, s'ouvre la porte vers la plénitude.

"En tant qu'aveugle, traverser la rue est probablement la chose la plus stressante que vous soyez amené à faire", selon Kevin Orcel. "Mais pouvoir courir sur une route en sachant que la voie est protégée, (...) c'est assez libérateur."

"C'est juste du plaisir, n'avoir à penser à rien", confirme Jasmine Murrell. "Je n'ai qu'à courir et aller jusqu'à la ligne d'arrivée."

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