Face au gel, l'État débloque des aides d'urgence aux agriculteurs
Trois journées consécutives de gel printannier ont infligé de lourdes pertes, comme en 2021, dans les vergers du Sud-Ouest, des dégâts qui seront en partie compensés, l’État ayant annoncé mardi le déblocage d'aides d'urgence.
Depuis le Tarn-et-Garonne, "un des territoires les plus touchés", le Premier ministre Jean Castex a promis "un fond d'aide d'urgence pour un montant de 20 millions d'euros" et l'activation du "fond national des calamités agricoles".
"Nous réactiverons également la prise en charge exceptionnelle de leurs cotisations sociales", a assuré le chef du gouvernement après la visite d'une exploitation sinistrée à 80% à Cazes-Mondenard.
La vallée de la Garonne, la Dordogne, certaines régions de l'Est, le nord de la région Aquitaine sont particulièrement touchés, a précisé Jean Castex, qui était accompagné du ministre de l'Agriculture Julien Denormandie.
Le gel a concerné moins de la moitié du territoire, d'après Jérôme Lecou, prévisionniste à Météo-France, alors que 90% de la France a été affecté par des gelées la nuit précédente, inquiétant en particulier les arboriculteurs.
- Défaut de trésorerie -
"Ce sont de bonnes mesures, mais ce qui manque c’est de la trésorerie, immédiatement", a réagi le président de la chambre d’agriculture du Tarn-et-Garonne Alain Iches, estimant que les aides risquaient de n’arriver qu’en fin d’année. Certains reçoivent tout juste les aides correspondant aux dégâts du printemps 2021, indique-t-il.
Les dégâts dans ce département, dans les plantations de fruits à noyau (prune, pêche), sont "certainement pire que l'an dernier". "On sera environ à 80% de pertes liées au gel", estime le président de la chambre d'agriculture, soulignant que ces chiffres sont encore à affiner.
La filière du pruneau d'Agen subit "un nouveau coup dur", avec des dégâts "généralisés sur toute l'aire de l'IGP (Indication géographique protégée)" qui "semblent comparables, voire plus importants que l'an passé", selon un communiqué du Bureau national interprofessionnel du pruneau.
- Rupture d'approvisionnement -
"S'il est encore trop tôt pour évaluer finement les pertes, on estime que près de 70% de la récolte est d'ores et déjà compromise", selon la filière, rappelant qu'en 2021, la commercialisation avait pu se maintenir "en raison des stocks permettant de compenser en partie la perte de récolte".
En 2022, "la rupture d'approvisionnement est quasi-certaine" et c'est "toute la filière de l'amont à l'aval qui se voit à nouveau gravement affectée par un épisode qui +ne devrait arriver qu'une fois tous les 30 ans+", mais tend à se répéter plus souvent du fait du changement climatique.
Le président de la Chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne, Serge Bousquet-Cassagne, est encore plus pessimiste: l'an dernier, "On avait perdu 70% de la récolte, cette année on sera à 80-90%" pour les prunes et pruneaux.
Selon lui, les kiwis, dont les bourgeons ont été protégés par un système d'aspersion d'eau à l'arrivée du gel, ont été également touchés, mais ont subi moins de dégâts. Touefois, "le coût de l'arrosage est ahurissant avec le prix actuel de l'énergie qui a augmenté de 60%, moi j'en suis pour 200 litres de gasoil chaque nuit", a témoigné Jean-Marc Poigt, qui préside Kiwi de l’Adour (400 producteurs Label rouge).
En Alsace, dans sa plantation d’arbres fruitiers à Traenheim, Timothée Rothgerber estime que si les épisodes de gel après des mois de février et mars doux, se répètent, ils ne pourraient "pas continuer comme ça économiquement".
Dans la vigne bordelaise, le président du Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux Bernard Farges, "craint un impact du niveau de 2021", tout en estimant que "les vignes les moins avancées ont été épargnées".
L'an dernier, après un épisode exceptionnel de gel en avril, les récoltes d'abricots, de cerises et de poires avaient été amputées de moitié par rapport à la moyenne des cinq années précédentes, selon le service statistiques du ministère de l’Agriculture. La production viticole avait aussi reculé à un "niveau historiquement bas": -19% sur un an et -14% par rapport à la moyenne des cinq dernières années.
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